Après ces deux semaines de Pâques, les étudiant.es de l’UCLouvain s’apprêtent à retrouver le chemin des auditoires. La reprise des cours en distanciel va de pair avec le blocus qui approche à grands pas. Pourtant, nous ne savons toujours pas à quelle sauce nous allons être mangé.es et notre appréhension grandit de jour en jour. Un formulaire, envoyé aujourd’hui par les autorités académiques, ne fait rien pour rassurer les étudiant.es…
À l’AGL, les témoignages d’étudiant·es que nous recevons parlent de plus en plus de sentiment d’impuissance, et nous font craindre un taux de décrochage scolaire très important. Face à ce constat, il nous semble que les modalités d’évaluation doivent être réévaluées et une prise de conscience sur la situation étudiante doit avoir lieu.
Malgré les efforts des professeur.es, un enseignement de moindre qualité
Après quatre semaines de cours en distanciel, nous pouvons constater que certains cours fonctionnent et que d’autres sont plutôt de l’ordre du bricolage. Malgré les efforts de beaucoup de professeur.es – que nous soulignons – il nous semble clair que notre enseignement s’est vu amputé d’une partie de son contenu ainsi que de sa cohérence. Certains cours ont été remplacés par des PDF à lire, d’autres par une multitude de travaux, d’autres encore par des conférences en ligne. Il est devenu difficile de s’organiser et de gérer la charge de travail qui s’impose à nous dans ces circonstances.
Les étudiant·es en difficulté
Au-delà des modalités d’enseignement, le problème des conditions de travail est lui aussi exacerbé par les cours en distanciel. Beaucoup d’étudiant.es souffrent aujourd’hui d’un manque matériel ou d’espace de travail, ce qui les empêche de suivre leurs cours dans de bonnes conditions. D’autres ont perdu leur job étudiant initial et ont dû prendre un job dans les secteurs prioritaires, très exigeants en termes d’heures. Ces étudiant.es n’ont plus le temps nécessaire pour suivre leurs cours et réaliser leurs travaux.
Notons aussi les étudiant·es qui vivent des situations familiales compliquées pour le moment, celles et ceux qui doivent rendre bientôt un mémoire ou TFE et sont dans l’incertitude et bien sûr les étudiant.es en situation de handicap, qui sont durement touché.es par ces changements de modalités, inadaptées dans de nombreux cas.
Les étudiant·es ne disposant pas des bonnes conditions pour suivre leurs cours devront compenser leur fatigue et la qualité de leur étude par du travail encore plus acharné. Ces longs mois difficiles peuvent mener à une dégradation physique et mentale pour beaucoup.
Stress, inégalités et inconnues ; les ingrédients d’un blocus réussi ?
Après avoir passé plus d’un mois et demi faire face à ce stress intense et à compenser la perte de qualité que subit l’enseignement, la population étudiante se retrouve plus esseulée encore face au blocus. Il est par ailleurs regrettable de constater qu’à ce jour aucune mesure n’ait été prise par l’université à ce sujet. Si un discours de bienveillance plane sur l’université, les directives claires manquent et n’aident pas à rassurer la communauté étudiante. Surtout, les modalités d’évaluations ne seront précisées que le 27 avril et d’ici là on ne sait pas quel est l’avenir de nos examens.
De plus, les solutions habituelles auxquelles l’on pourrait avoir recours en temps normal pour augmenter l’efficacité de l’étude ne sont plus accessibles. Pour contrer la difficulté de la situation et augmenter l’efficacité de l’étude, tels que le travail en groupe ou en bibliothèque, ne sont plus accessibles.
L’université agit comme si nous faisions seulement face à un confinement, alors que nous sommes aussi confronté·es à une pandémie. Les étudiant·es ne sont pas épargné·es par la situation anxiogène que provoque le coronavirus. Face à cela, l’université, au lieu d’atténuer l’anxiété, adopte des modalités d’évaluation et de surveillance à distance qui suscitent de la peur et du stress.
Le coût à payer
Le constat est clair, la qualité de notre enseignement s’est vue amoindrie et le blocus à venir risque d’être une catastrophe. Quelles solutions alors pour nos évaluations ? L’UCLouvain entend transformer les modalités d’évaluation dans certains cas. Pour d’autres, l’évaluation se tiendra à distance. Face à ces évaluations distancielles, cette politique de suspicion est en contradiction avec le discours de bienveillance. Nous serons pris·es en photos, par notre ordinateur, à de multiples reprises, pour s’assurer que nous ne trichons pas.
Cette méthode de surveillance par webcam pose des questions au sujet de l’intimité et du droit à la vie privée. Nous appelons l’UCLouvain à revoir sa position. En effet, le climat déjà tendu demande de trouver des solutions d’apaisement. En changeant de manière réfléchie les modalités d’évaluation, de tels dispositifs anti-triche orwelliens n’auraient plus d’utilité.
Celles et ceux qui ne disposent pas des moyens matériels nécessaires ou qui refusent la surveillance à domicile seront invité.es à passer leurs examens sur le site de l’université, se mettant ainsi en danger sanitaire. Rappelons à ce titre que la fracture numérique touche 4% de la communauté étudiante, selon la FEF, et ce sans compter celles et ceux qui n’ont pas accès à un espace de travail de qualité ou qui vivent des conditions de confinement compliquées. Au terme de tout cela, la seule chose que l’on sait, c’est que les examens mènent au casse-pipe.
Des solutions ambitieuses
En conclusion de cette situation extrêmement stressante pour une bonne partie des étudiant·es, nous demandons que :
- Des directives claires et rassurantes soient prises concernant la tenue des examens et qu’un appel à l’allègement des sessions d’examens soit fait dans l’ensemble des facultés.
- Les évaluations classiques soient remplacées par des évaluations à cours ouvert et qu’elles soient allégées.
- Les cours pour lesquels il n’y aurait pas de modalité d’évaluation adaptée, la proclamation automatique soit envisagée, accompagnée par des évaluations formatives ainsi qu’une note administrative.
- Veiller à ce que chaque étudiant·e, qu’elle que soit sa condition socio-économique, dispose de conditions adaptées pour étudier et pour passer ses examens en le mettant le moins possible en danger face à la pandémie.
Ces décisions doivent être prises en tenant compte des particularités des facultés et qui laissent l’opportunité aux autorités locales de prendre des décisions fortes en faveur des étudiant·es. Il est temps de rassurer la communauté étudiante afin que celle-ci ne reste pas dans l’incertitude et n’appréhende pas le blocus et les examens comme elle le fait actuellement.